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L’intelligence artificielle en plein boom : quel impact pour les brevets ?

« Intelligence Artificielle » est une expression que l’on trouve désormais quotidiennement dans les médias, les réseaux sociaux, et dans le vocabulaire des grandes entreprises comme des startups. L’ampleur de la communication autour de ce concept fait parfois oublier sa signification première.

L’intelligence artificielle est un terme général utilisé pour regrouper un ensemble d’outils basés sur l’informatique et les mathématiques, visant à doter un système informatique de compétences qui requièrent normalement l’intelligence humaine, comme par exemple la réflexion, la compréhension, ou l’apprentissage. Parmi ces outils, on trouve notamment les algorithmes d’apprentissage machine ou machine learning, qui sont des algorithmes conçus pour analyser de grandes quantités de données afin d’en extraire des informations pertinentes (par exemple diagnostics automatisés par traitement d’images) ou des règles (par exemple des modèles prédictifs de phénomènes complexes).

Le développement de ces algorithmes a été rendu possible par un accès facilité à des ressources de calcul très importantes – souvent grâce à des serveurs communiquant en cloud – ainsi qu’à des quantités de données disponibles en très forte croissance grâce à l’explosion des objets connectés.

Par ailleurs, les techniques d’intelligence artificielle peuvent trouver des applications dans de très nombreux domaines tels que le marketing, la santé, la biologie, l’agriculture, l’automobile, l’aéronautique, etc., ce qui contribue à l’engouement qu’elles suscitent.

Ainsi, le marché de l’intelligence artificielle pour les applications en entreprise est estimé à plus de 36 milliards de dollars d’ici à 2025 en intelligence artificielle contre 643 millions de dollars en 2016, soit une tendance d’augmentation de plus de 50 % par an (source : Tractica, 2017). De plus, les investissements dans les startups spécialisées en intelligence artificielle ne cessent d'augmenter depuis 2012, passant de 415 millions de dollars à 5 milliards de dollars en 5 ans (source : CB Insights, Janvier 2017).

Bien entendu, le développement de l’intelligence artificielle trouve une résonance dans le domaine des brevets, puisque les dépôts de brevets ont subi une augmentation constante dans les domaines de l'intelligence artificielle entre 2008 et 2014, suivi par une très nette augmentation ces dernières années. A titre d’exemple, l’Office Européen des Brevets a enregistré un taux de croissance annuel moyen des dépôts de brevets européens de 43 % entre 2011 et 2016.

La répartition géographique des dépôts de brevets européens dans le domaine de l'intelligence artificielle montre que l'Europe et les Etats Unis sont les leaders dans ce domaine avec conjointement plus de 60% des inventions. En Europe, la France, avec plus de 10 % des dépôts européens, est le premier déposant dans le domaine de l'intelligence artificielle, suivie par l'Allemagne (9 %). En particulier, la région Île de France est la région leader parmi toutes les régions européennes (source : OEB, Décembre 2017)

On aurait pu penser que, les techniques d’intelligence artificielle étant mathématiques et informatiques par nature, elles ne seraient pas brevetables. Or il est souvent possible de breveter des techniques d’intelligence artificielle moyennant quelques précautions.

En premier lieu, il faut s’assurer que l’invention que l’on cherche à protéger comporte des moyens techniques, comme par exemple un calculateur, un ordinateur, une mémoire, etc. A cet égard, un réseau de neurones peut être considéré comme un calculateur et peut lui-même être breveté. En revanche, il ne peut pas être revendiqué dans un brevet une méthode mathématique en tant que telle ou un programme d’ordinateur en tant que tel.

Ensuite, l’invention doit respecter les conditions de fond habituelles de la brevetabilité qu’en Europe on appelle nouveauté et activité inventive. Pour cela, il faut généralement que l’invention revendiquée apporte un effet technique résolvant un problème technique.

Dans cette perspective, on peut breveter des technologiques d’intelligence artificielle à plusieurs niveaux.

On peut notamment protéger l’utilisation d’un algorithme d’intelligence artificielle dans une application particulière, comme le traitement automatique d’images pour reconnaître des formes, estimer des paramètres physiques ou commander un appareil, ou encore l’optimisation de ressources, etc. Cette application doit présenter un caractère technique, qui pourra être difficile à justifier si l’invention ne met en jeu qu’essentiellement des considérations économiques.

D’autre part, on peut parfois protéger des briques technologiques au cœur de l’intelligence artificielle, indépendamment de toute application – telles qu’un procédé d’entrainement d’un modèle, une structure particulière de réseau de neurones, etc. – si on démontre l’obtention d’un effet technique, comme par exemple un temps de calcul réduit ou une plus grande vitesse d’apprentissage.

L’appréciation de ces questions varie d’un pays à l’autre. Elle varie aussi dans le temps étant donné que la jurisprudence s’adapte aux évolutions de la technologie.

N’hésitez pas à vous rapprocher de votre conseil habituel pour toute question sur le sujet.

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