Articles

Le déroulé d’une procédure orale en opposition devant l’INPI
Brevets

Le déroulé d’une procédure orale en opposition devant l’INPI

Rédigé par Laurence Loumes

Schéma général de la procédure

La nouvelle procédure d’opposition de l’INPI, disponible depuis le 1er avril 2020et applicable aux brevets françaisdélivrés à compter de cette date, ouvre dans les 9 mois de leur délivrance la faculté de les contester pour défaut de brevetabilité, sans passer par le système judiciaire.

Cette voie administrative offre aux utilisateurs la promesse d’un gain de temps et de moindre coût, que lors d’un recours aux tribunaux.

Le processus d’opposition est composé3 :

  • d’une partie écrite dans laquelle le titulaire et l’(ou les) opposant(s) exposent leurs arguments sur la brevetabilité ou l’absence de brevetabilité des revendications4,
  • d’un avis préliminaire écrit, 
  • d’une procédure orale facultative (à la demande d’une partie ou à l’initiative de l’INPI s’il l’estime nécessaire), avant le prononcé de la décision définitive par la commission d’opposition.

En octobre dernier, Plasseraud est intervenu dans une des toutes premières procédures orales en opposition devant l’INPI.

Plongée dans la phase orale

Les opérations se déroulent au siège de l’INPI au 15 rue des Minimes à Courbevoie, qui possède un auditorium dans lequel se déroule la procédure orale.

Le calendrier des audiences est publié en amont (date, parties impliquées, numéro du brevet en cause) de sorte que le public peut assister aux débats.

Les identités des personnes souhaitant participer ou simplement assister à la procédure orale sont prises à l’accueil, et un agent de l’INPI accompagne les personnes à l’auditorium de l’INPI.

Quatre zones distinctes occupent la salle, se faisant face deux à deux :

  • Public et Commission d’une part
  • Titulaire et Opposant de l’autre 

 

Public et Commission - Titulaire et OpposantPublic et Commission - Titulaire et Opposant

L’opposant est positionné à gauche de la commission d’opposition et le titulaire à droite. Le public peut se positionner à sa guise.

Chacune des parties est munie d’un micro afin que la salle puisse l’entendre distinctement. Deux types de micros sont mis à disposition : un micro de type casque, et un classique que l’on prend à la main. Il est possible de se lever et exposer ses arguments de façon à faire face à la commission d’opposition si cela facilite la compréhension.

La commission d’opposition est constituée de trois membres techniques : le président, un expert délégué à la prise de notes en vue de la rédaction de la décision, un expert délégué à la rédaction du procès-verbal. Les membres de la commission d’opposition sont tous des examinateurs de l’INPI.

La présence d’un expert juridique à la procédure orale à laquelle nous avons participée (qui est, rappelons-le, optionnelle) était surement due à la nécessité de discuter d’un point d’interprétation du langage de la revendication.

Le déroulé de la procédure orale devant l’INPI est globalement similaire à celui devant l’OEB. Le président de la commission ouvre les débats en identifiant le brevet concerné par la contestation ainsi que les parties impliquées, qui sont invitées à formuler leurs prétentions (révocation, maintien, modification du brevet).

Chaque point de discussion annoncé par le président (par exemple interprétation d’une caractéristique technique, respect de la condition de nouveauté par rapport à tel document du dossier…) donne lieu à autant d’échanges que nécessaire entre les parties. La parole est donnée en premier à l’opposant, le titulaire devant toujours conclure le point examiné. Les membres de la commission peuvent se concerter brièvement à voix basse entre eux, et c'est généralement le président qui s'adresse aux parties.

Lors des débats, l’accent est mis sur la possibilité de clarifier ces propos, la procédure orale ne consistant pas en une simple redite des arguments écrits.

Avant d’aborder le point ou motif d’opposition suivant, la commission par le biais de son président, invite les parties et le public à se retirer de l’auditorium afin de délibérer sur le point dont il a été débattu, et annonce une durée de temps de pause approximative (par exemple 15 min). Pendant le temps de pause, il est possible de se restaurer au snack adjacent à l’auditorium.

Une fois le point discuté décidé, la commission rappelle les parties dans l’auditorium. Elle peut alors demander des renseignements supplémentaires, ou directement donner sa décision sur le point en question (ex : manque de nouveauté par rapport à tel document). Cette décision n’est pas motivée, de sorte que le raisonnement de la commission ne sera accessible que lors de la décision écrite de la commission fournie quelques mois après la procédure orale.

Si d’autres points doivent être discutés, le président mentionne le nouveau point et invite les parties à se positionner. Chaque point est ainsi soumis les uns à la suite des autres jusqu’à extinction des motifs d’opposition, avec la possibilité pour chaque partie de s’exprimer en alternance dans le respect du contradictoire, tout en laissant la dernière parole au titulaire qui défend son brevet. Il est intéressant de noter que contrairement à l’OEB lorsqu’une revendication est trouvée non brevetable (exemple : la revendication 1), la commission demande de se positionner sur la revendication suivante (exemple : la revendication 2) sans passer par le dépôt d’une nouvelle requête qui omettrait la revendication non brevetable (exemple : présentation d’une nouvelle requête qui combinerait la revendication 2 à la revendication 1).

En fin de procédure orale, même si cela n’est pas obligatoire mais constaté en pratique, une décision est prononcée oralement : brevet révoqué, maintenu ou maintenu sous forme modifiée, et la séance est levée.

Après la procédure orale

Une semaine environ après l’audience, l’INPI adresse aux parties un courrier intitulé « Notification de la date de fin de phase d’instruction » faisant débuter le délai de 4 mois pour l’envoi de la décision écrite motivée.

Cette décision écrite, signée par le Directeur général de l’INPI, sera le point de départ du délai de recours de 1 mois pour faire appel devant la Cour d’Appel de Paris si une ou les deux parties contestent la décision5.

Il est recommandé d’être attentif à ce calendrier car en vertu du principe suivant lequel « silence vaut rejet » applicable à ce type de procédure, l’absence d’émission d’une décision dans les 4 mois en question signifierait que l’opposition a été réputée rejetée6.


Ordonnance n° 2020-116 du 12 février 2020 publiée le 13 février 2020 au Journal officiel, et entrée en vigueur le 1er avril 2020
Le fait générateur du délai de 9 mois est la publication de la mention de la délivrance du brevet (R. 613-44 CPI)
Décision n° 2020-34 du 1 avril 2020 du Directeur de l’INPI sur les modalités de la procédure d’opposition
On rappelle les motifs de révocation d’un brevet français : insuffisance de description, manque de nouveauté, d’activité inventive ou d’application industrielle, extension de l’objet du brevet au-delà du contenu de la demande telle que déposée initialement, ou encore objet exclu de ou étant exception à la brevetabilité
R612-73-3 et R411-21 CPI
L613-23-2 CPI

Partager sur :